Philosophie

Dimension pédagogique et thérapeutique du dialogue philosophique : qu’est-ce qu’un dialogue philosophique ? (I)

Après avoir introduit dans notre article précédent (Dimension pédagogique et thérapeutique du dialogue philosophique : Introduction) la problématique et proposé le plan de notre étude ainsi que la bibliographie, demandons-nous tout d’abord qu’est-ce qu’un dialogue, et plus précisément qu’est-ce qu’un dialogue philosophique ?

1. Le dialogue philosophique

1.1. Définition du dialogue

De manière générale, qu’est-ce qu’un dialogue ? Qu’est-ce qu’il nous permet de faire ? Puis de quel genre d’entité s’agit-il ? En d’autres termes, est-ce que le dialogue est un récit, un discours, un mécanisme réflexif, une interaction orale voire un ensemble de tous ces éléments ? Pour répondre à ces questions, penchons-nous sur une première définition : « le dialogue est par nature principe de contradiction et de conflit (agôn) : il est supposé construire, sur la base d’un objet commun, une confrontation argumentative qui produit une action, et permet une révélation du personnage par ses paroles, mais aussi une avancée sémantique 1». Le dialogue serait, à l’inverse d’une simple discussion, un mode de conversation convoquant la raison et le discernement et reposant sur une argumentation dont l’objet discuter serait commun et dont l’objectif serait d’atteindre une solution à un problème posé (même si le dialogue n’aboutit pas forcément à une réponse unique et définitive). Il y aurait donc un objet commun (par exemple l’amour) dont l’objectif serait de trouver une définition de cet objet. Autrement dit, le dialogue dont l’objectif serait d’atteindre la vérité, d’accéder à l’universel, serait une manière d’oser et de re-questionner nos propres opinions par le questionnement et le raisonnement, afin de passer de l’état d’ignorance à celui de connaissance d’un objet questionné. Ces caractéristiques représentent ce que l’on appelle précisément le dialogue philosophique. On les retrouve dans ce qui caractérise la dialectique socratique dans les dialogues platoniciens. En effet, et comme nous le verrons, celle-ci propose une démarche et un itinéraire, une montée progressive vers le vrai, loin des illusions et des croyances d’ordre purement sensible ou imaginatif. Cette recherche de la vérité est d’essence démocratique puisque les vérités prétendent valoir pour tout le monde en tous lieux et prétendent à l’universalité. L’idée d’arriver à un consensus de l’objet discuté entre les interlocuteurs répond ainsi à la dimension démocratique de la recherche de la vérité. Toutefois, est-ce que le consensus est une finalité du dialogue philosophique ? L’œuvre de Platon nous montre que certains dialogues sont aporétiques, c’est-à-dire que la recherche d’une définition de l’objet discuté n’aboutit pas à nécessairement à une conclusion ferme et définitive : les interlocuteurs n’arrivent donc pas forcément à un consensus (à un accord mutuel, à s’entendre sur la chose). Cependant, le raisonnement et l’argumentation aura tout de même permis aux interlocuteurs de progresser dans la réflexion : l’objectif n’est donc que partiellement atteint à ce stade du dialogue mais cela n’enlève pas le fait qu’il y a une progression de la connaissance de l’objet discuté. Si le consensus n’est pas une finalité du dialogue philosophique, il reste un moyen de progresser dans le raisonnement : le but suprême étant la recherche de la vérité.

Quoi qu’il en soit, s’il y a la recherche d’une définition dans un dialogue philosophique, et que celle-ci repose sur un échange verbal entre des personnes – cela présuppose qu’il y a forcément plusieurs avis et donc plusieurs interlocuteurs qui participent (au moins deux). Car il semble impensable de pouvoir dialoguer sans la présence d’un autre interlocuteur puisqu’à ce moment-là, nous passerions d’un dialogue à un monologue. Le monologue serait-il la limite du dialogue ? Or, est-ce qu’un dialogue nécessite forcément la présence d’autrui ? Car ne peut-on pas dialoguer avec soi-même ? Sur ce point, l’étymologie nous renseigne puisque le mot « dialogue » vient du verbe grec dialegomai qui lui signifie converser 2. Aussi dia signifie « à travers » ou « à cause » alors que logos signifie « la parole », « la raison ». « Dialogue » signifierait donc entretien ou conversation à travers lelogos la parole, le discours, la pensée. Ainsi, s’il y a conversation à travers la pensée, cela signifierait que le dialogue peut être intérieur (dans un dialogue, l’interaction entre des personnes qui parlent ne serait donc pas une condition nécessaire). Platon nous bien que « ce que me semble faire l’âme quand elle pense : rien d’autre que dialoguer, s’interrogeant elle-même et répondant, affirmant et niant » (Théétète, 190a). Cependant, si le logos signifie également la parole – qui elle est comprise comme l’expression verbale de la pensée – et que celle-ci est confrontée à la parole d’autres interlocuteurs, il semble que nous pouvons également appeler cette forme de discours un dialogue. « Le dialogue, en définitive est la pensée qui prend consistance : parler avec l’autre c’est penser avec lui 3» : il permet de chercher « la bonne définition [qui elle] doit renvoyer à ce qu’est véritablement la chose, à son ousia, c’est-à-dire le « ce que c’est » de la chose 4». Et pour éviter la bataille des points de vue, le seul moyen est de « progressivement resserrer le débat » en arrêtant la discussion pour convenir d’une définition communément acceptée et d’en vérifier la solidité » : l’objectif étant de se mettre en quête d’une définition et s’entendre sur celle-ci 5. Par conséquent, la finalité du dialogue philosophique reposerait avant tout sur la recherche d’une définition plutôt que sur la proposition d’une définition définitive. Cela dit, cela n’exclut pas la finalité de la philosophie qui repose sur la recherche d’une vérité assurée. Ce qui n’est pas le cas de la rhétorique qui consiste en l’art de bien parler, de manière convaincante et persuasive, et qui ne se préoccupe pas de la vérité « à la manière de ces intellectuels sophistes s’amusant à produire de beaux effets de langage qui émerveillent les jeunes (Platon, Sophiste, 234c) 6. En effet, les sophistes « jouent avec les énoncés, avec des contenus de propositions, mais ne vont jamais jusqu’à l’acte de penser 7» : il s’agit de produire un discours fort, beau, persuasif et bien construit qui ne mène pas à une véritable connaissance (« il n’est qu’un endoctrinement bas et ne mène pas l’homme à son être vrai ; il n’est pas utile pour l’éducation, et encore moins pour les sciences 8»). Ainsi, la rhétorique persuade, elle est un jeu de pouvoir qui entre en conflit avec le dialogue philosophique qui vise la recherche d’une vérité ultime 9. En ce sens, le discours rhétorique (l’art de persuader) se distingue du dialogue philosophique (l’art de raisonner) puisqu’il est avant tout un monologue qui appartient au domaine de l’autorité et du pouvoir. De plus, et d’un point de vue du critère de la vérité de la parole, si le dialogue philosophique est considéré comme un discours vrai (l’épistèmè est ce qui est acquis dans le dialogue) alors la rhétorique consiste en un discours faux qui est de l’ordre de la doxa 10.

Bref, à ce stade, le dialogue philosophique pourrait être définit comme un processus dialectique interne ou externe où la pensée s’interroge sur ce que c’est qu’une chose (à la recherche d’une définition), toujours en convoquant la raison, en n’abandonnant jamais le souci de penser en vérité, tout en aboutissant à une adhésion généralisée sur ce qui est admis jusqu’à preuve du contraire. Il n’y a pas de dialogue sans pensée ni de pensée sans dialogue. La pensée est donc dialectique dans le sens où elle s’interroge elle-même (elle se demande et se donne une réponse à elle-même). Ce mouvement cognitif constitue la réflexion qui est le propre de l’acte de philosopher. Ainsi, la pensée constitue le moyen par excellence de philosopher, une pensée qui s’exprime par le dialogue philosophique qui lui est dialectique (qu’il soit interne ou externe). Philosophie, pensée et dialogue sont par conséquent indissociables.

1.2. Le dialogue philosophique comme genre littéraire

Si le dialogue est tout d’abord un mode de conversation, il est également un genre littéraire. « Le dialogue (également en latin : dialogus), est un genre littéraire présentant des personnages en train de dialoguer, d’échanger par le biais de la parole 11». Platon semble être le premier à mettre la philosophie sous forme de dialogue écrit ce qui ferait de lui l’inventeur de cette forme littéraire. Selon Diogène Laërce,

« Zénon d’Élée passe pour avoir le premier composé des dialogues ; cependant Aristote, au premier livre des Poètes, et Phavorinus dans les Commentaires, prétendent que cet honneur revient à Alexaminus de Styra ou de Téos. Quoi qu’il en soit, Platon, grâce aux perfectionnements qu’il a introduit dans ce genre, peut revendiquer, ce semble, non seulement la première place, mais même la gloire de l’invention » (DL III, 48).

PlatonMalgré ses prédécesseurs, Platon innove donc en proposant des échanges verbaux écris entre deux ou plusieurs interlocuteurs, c’est-à-dire entre des personnes qui dialoguent entre elles, par le biais du discours philosophique. Si Aristote ne dit ne pas avoir « un terme commun pour désigner […] les dialogues socratiques » (La Poétique, 1447b10), Diogène dit du dialogue platonicien qu’il est « un discours par demandes et par réponses, sur quelque sujet de philosophie ou de politique, discours composé avec art et élégance, et conservant aux personnages leur caractère propre 12». Ce nouveau genre littéraire (logoi sokratikoi), qui imite les discussions orales et qui inscrit et met en scène la dialectique socratique aurait un rôle éducatif puisqu’il permettrait aux lecteurs de « participer » au cheminement réflexif de Socrate. Comme le souligne C. Gill, il existe plusieurs façons de lire les dialogues platoniciens. Étant donné que certains dialogues ne sont pas censés offrir des conclusions complètement élaborées – c’est le cas notamment des dialogues aporétiques comme le Lysis ou le Protagoras –, une des perspectives serait de prétendre que les dialogues de Platon « sont écrits de façon à stimuler le lecteur, afin qu’il en vienne à réfléchir, par lui-même, aux idées discutées 13». Ainsi, le lecteur se voit confronté à un réel exercice philosophique : rien n’est donné d’avance, c’est au lecteur de pousser son raisonnement jusqu’à trouver sa ou ses propres conclusions. Le dialogue platonicien serait une sorte de guide de l’acte de philosopher : tout d’abord par une recherche commune entre Socrate et ses interlocuteurs mais également par la recherche individuelle du lecteur (on remarque ici le double aspect pédagogique du dialogue platonicien). En effet, cette proposition de lecture des dialogues de Platon que l’on pourrait qualifier de propédeutique fait sens lorsqu’elle est comparée à la méthode dialectique socratique – sa maïeutique –, une méthode « conçue pour donner naissance aux idées des autres plutôt que pour leur transmettre des idées déjà entièrement élaborées 14». Elle répondrait également à la critique de Platon sur l’écriture qui « donne au lecteur la fausse impression de posséder un savoir qu’ils n’ont pas acquis eux-mêmes au prix d’une enquête dialectique active 15». En effet, dans le Phèdre, Platon distingue le discours oral du discours écrit en disant de ce dernier qu’il n’est :

« qu’un moyen de se souvenir, tandis que les discours qui servent à l’enseignement, qui sont prononcés pour instruire et qui sont en réalité écrit dans l’âme où ils parlent du juste, du beau et du bien, sont les seuls à comporter clarté et perfection et à mériter d’être pris au sérieux » (Phèdre, 278a, trad. L. Brisson, je souligne).

Rappelons que l’enseignement philosophique qui était proposé par l’Académie (Platon) ou par le Lycée (Aristote) était avant tout un enseignement oral. C’est la raison pour laquelle Platon affirme que le discours oral est une forme de discours supérieure à celui de l’écrit : l’écriture est juste un moyen de conservation de l’information tout comme elle ne produit que des œuvres inertes comparativement au dialogue oral qui lui est vivant, concret et fastidieux parce qu’il nécessite de l’improvisation et demande un grand effort de mémorisation 16. La tâche principale du philosophe n’est donc pas d’écrire :

« et s’il peut, en expliquant la chose, démontrer que ses écrits sont de peu d’importance, un tel homme […][on doit] l’appeler un philosophe » (Phèdre, 278c-d, trad. L. Brisson).

« En revanche, celui qui n’a rien de plus précieux que ce qu’il a composé et qu’il a écrit, en passant du temps à le tourner dans tous les sens, à coller des morceaux les uns aux autres et à faire des coupures, c’est à juste titre, je [Socrate] suppose, que tu [Phèdre] l’appelleras « poète », « rédacteur de discours », ou « rédacteur de lois » » (Phèdre, 278d-e, trad. L. Brisson).

Rédiger et apprendre par cœur des discours comme le fait Lysias dans le Phèdre, c’est le travail d’un poète ou d’un orateur et non pas celui d’un philosophe (pour Socrate, Lysias n’est donc pas un philosophe). En effet, si le philosophe confie son savoir à des discours écrits, ils ne sont que des jeux, voire des divertissements. Alors que le discours oral du philosophe est quant à lui sérieux parce qu’il instruit, parce qu’il sème dans les âmes des disciples le discours du maître 17. La transmission orale du savoir est donc supérieure : l’acte de philosopher émerge dans le dialogue philosophique alors que les discours écrits ne sont que les images des discours oraux. Notons que cette opposition entre parole et écriture renvoi à celle du modèle et image mais également à celle du sérieux et du jeu 18 ce qui reflète parfaitement bien la supériorité de l’un sur l’autre. Dès lors, on peut se demander pourquoi Platon écrit des dialogues s’il considère que l’écriture est une forme inférieure du discours ? Pour L-A. Dorion, le genre du discours socratique était pour Platon une manière « de défendre la mémoire de Socrate contre ceux qui l’avaient injustement accusé et condamné. Cette visée apologétique, chez Platon, ne se limite pas à l’Apologie, puisqu’elle est également présente dans plusieurs dialogues de jeunesse, dont l’Euthyphron, le Charmide, le Lysis, l’Alcibiade et Le Banquet 19».

Bref, si l’écriture donne la fausse impression de posséder un savoir, le dialogue platonicien – en tant que genre littéraire – a comme avantage de mettre en branle la réflexion du lecteur à défaut de pas pouvoir participer à un dialogue oral authentique. L’exercice philosophique vécu par les interlocuteurs de Socrate se manifeste chez le lecteur à travers la lecture d’un dialogue platonicien : le lecteur devient actif en prenant part à la recherche dialectique au même titre que l’interlocuteur de Socrate. Cela dit, l’hypothèse que les dialogues platoniciens sont des œuvres où l’issue reste ouverte n’est qu’une façon de les interpréter, que ce soit les dialogues aporétiques où les autres. Certains dialogues semblent mener à des conclusions parfaitement définitives du moment que l’on s’adonne à une interprétation soutenue pour en déchiffrer le sens 20. Quoi qu’il en soit, nous pouvons relever le fait qu’un dialogue, même s’il est aporétique, permet au lecteur de penser par lui-même et de tirer ses propres conclusions de la thèse discutée. Le dialogue philosophique dans sa forme littéraire peut, à ce titre, être considéré comme un outil pédagogique parce qu’il permettrait d’une part de susciter une réflexion philosophique avec soi-même en faisant l’expérience intérieure de l’acte du philosopher et d’autre part d’acquérir de nouvelles connaissances conceptuelles (acquisition que l’on peut assimiler à la recherche d’une définition ou de la vérité). Cette expérience du philosopher par la lecture est également une manière de comprendre et d’acquérir les mécanismes de la dialectique socratique. Comme le souligne Hadot, « Socrate et Platon n’invitaient-ils pas leurs disciples à trouver par eux-mêmes les solutions dont ils avaient besoin ? 21» Cette question concernerait également le lecteur.

1.3. Le dialogue philosophique comme exercice spirituel

Pierre HadotPierre Hadot définit les exercices spirituels comme des moyens pratiques et concrets qui « contribuent puissamment à la thérapeutique des passions 22» : ils sont des exercices qui « correspondent à une transformation de la vision du monde et à une métamorphose de la personnalité ». Ils sont l’œuvre, non seulement de la pensée, mais de tout le psychisme de l’individu » ce qui permet à ce dernier de s’élever « à la vie de l’Esprit objectif » 23. Les exercices spirituels sont très représentatifs de la philosophie de l’Antiquité. On retrouve ces pratiques précises dans les écoles hellénistiques et romaines de philosophie, notamment chez les stoïciens où la philosophie est avant tout un « exercice », c’est-à-dire « un art de vivre, dans une attitude concrète, dans un style de vie déterminé, qui engage toute l’existence », et non pas un enseignement d’une théorie abstraite comme cela est le cas aujourd’hui 24. Ainsi, les exercices spirituels visent à rendre meilleur celui qui les pratique : ils ont une visée pédagogique, éthique et thérapeutique. Cette progression par l’application quotidienne de ces exercices a la capacité de « bouleverser une vie », de changer l’être de celui qui les accomplit, faisant passer celui-ci d’une « vie inauthentique, obscurci par l’inconscience », « à un état de vie authentique, dans lequel [il] atteint la conscience de soi, la vision exacte du monde, la paix et la liberté intérieure » 25. Parmi ces exercices, Hadot propose une liste « d’une thérapeutique philosophique d’inspiration stoïco-platonicienne » 26. Toutefois, si cette liste ne propose pas le dialogue en tant qu’exercice spirituel autonome, il participe à l’exercice de la méditation 27 (par le dialogue avec soi-même), à celui de la lecture (en lisant une œuvre philosophique, le lecteur va dialoguer avec lui-même) 28 puis également à celui de l’écriture (les Lettres à Lucilius de Sénèque et les Pensées pour moi-même de Marc-Aurèle en sont des exemples très représentatifs). Ainsi, le caractère dialectique semble apparaître dans plusieurs exercices spirituels (dialogue et pensée sont intimement liés).

Par conséquent, Hadot considère également le dialogue socratique « comme un exercice spirituel pratiqué en commun qui invite à l’exercice spirituel intérieur, c’est-à-dire à l’examen de conscience, à l’attention à soi, en bref au fameux « Connais-toi toi-même » 29» (un dialogue doit donc être compris comme exercice pratique et spirituel). On retrouve ici la dimension interne du dialogue avec soi-même qui ne doit pourtant pas être séparée du dialogue avec autrui. En effet, Hadot précise que « seul celui qui est capable d’une vraie rencontre avec autrui est capable d’une rencontre authentique avec lui-même et l’inverse est également vrai. Le dialogue n’est vraiment dialogue que dans la présence authentique, à soi et aux autres 30». Dialogue et présence authentique sont donc intimement lié : soit une présence à soi, soit une présence à autrui si bien que sans cette présence, il n’y a pas de dialogue. On retrouve cette double présence dans les dialogues platoniciens : d’une part la présence réelle entre Socrate et ses interlocuteurs que Platon a probablement vécu et d’autre part la présence à soi dans l’exercice de la lecture de ces dialogues. Hadot ne manque pas d’ajouter que « les dialogues platoniciens sont des exercices modèles ». Sa définition est la suivante : « un dialogue est un itinéraire de pensée dont le chemin est tracé par l’accord, constamment maintenu, entre un interrogateur et un répondant 31». Ce qu’il faut comprendre ici, c’est que le dialogue, et plus précisément la dialectique socratique, consiste en « un combat, amical mais réel » entre des interlocuteurs, un exercice concret et pratique où il ne s’agit pas d’exposer la vérité ni de la démontrer mais de faire en sorte que les réponses soient fondées « que sur ce que l’interlocuteur reconnaît savoir lui-même » (Platon, Ménon, 75c-d) : l’objectif étant de « se faire changer soi-même de point de vue, d’attitude, de conviction » 32. Une pensée qui dialogue constamment avec elle-même est un exercice en soi, elle est un mode d’interrogation qui questionne nos croyances, nos faux savoirs, nos valeurs, nos agissements, parce qu’il y a une exigence éthique qui est celle de poursuivre une vie la plus vertueuse possible (du moins dans l’Antiquité). Ce face à face avec soi-même qui consiste en une connaissance de soi et qui contribue à la déconstruction d’un système de croyances souvent fondé sur l’ignorance est le propre de l’acte du philosopher, de l’exercice dialectique. La méthode d’interrogation, qu’elle soit interne à la pensée ou proposée dans le cadre d’un dialogue entre des interlocuteurs constitue l’élément qui aura pour effet de bouleverser les âmes. Comme le souligne Hadot, la dialectique mène « l’interlocuteur à découvrir les contradictions de sa propre position ou à admettre une conclusion imprévue » parce qu’elle est une méthode subtile qui n’hésite pas à passer par des détours, des digressions, des suites d’interrogations et des divisions sans fin pour tenter de résoudre une problématique 33 (même si la solution au problème reste secondaire). Ce qui compte au juste, c’est que le processus dialectique puisse permettre à l’interlocuteur de faire l’expérience du cheminement de la pensée. « C’est le chemin parcouru pour y parvenir, chemin dans lequel l’interlocuteur, le disciple, le lecteur, forment leur pensée, la rendent plus apte à découvrir par elle-même la vérité 34». De ce fait, on comprend que même si Socrate s’obstine à la recherche d’une définition, c’est bien le chemin qui même à cette tentative qui est révélateur pour l’interlocuteur qui le suit : « la définition n’est rien par elle-même ; tout est dans le chemin parcouru pour l’atteindre 35» (l’aporie n’est donc pas une problématique en soi comme nous l’avons vu précédemment).

Cet apprentissage de la construction d’une pensée critique par le cheminement dialectique est propre à l’exercice pratique de la philosophie. Les dialogues platoniciens nous montrent exactement ce cheminement qui constitue l’acte du philosopher. C’est en lisant ces dialogues que l’on est invité à apprendre à dialoguer avec soi-même. Hadot nous donne deux nouvelles raisons qui justifie le rapprochement entre dialogue et exercice spirituel : « tout d’abord, il conduit, discrètement, mais réellement, l’interlocuteur (et le lecteur) à la conversion 36» ; « d’autre part, aux yeux de Platon, tout exercice dialectique […] détourne l’âme du sensible et lui permet de se convertir vers le Bien » 37 (en l’occurrence le bien moral et la justice). Nous pouvons déjà constater que cet itinéraire dialectique – proposé comme un exercice spirituel – est d’une part pédagogique parce qu’il a la capacité de former une âme par le questionnement philosophique et d’autre part « thérapeutique » 38 puisqu’il permet de transformer et donc de participer à la bonne santé de l’âme (de détourner l’âme du sensible). En acceptant de se soumettre aux exigences du logos, l’interlocuteur tout comme le lecteur se retrouvent ainsi confrontés à eux-mêmes par l’expérience concrète du dialogue philosophique. Or, peut-on prétendre que l’expérience de l’interlocuteur et du lecteur soit similaire ?

1.3.1. Dialoguer avec autrui, dialoguer avec soi-même

Dans le chapitre « Apprendre à dialoguer 39», Hadot n’évoque pas la différence entre un enseignement reçu à partir d’une expérience concrète du dialogue philosophique (lors d’une réelle discussion entre le maître et son élève) et celui acquis par la lecture d’un texte philosophique (comme les dialogues platoniciens). Or, pour convertir une âme, un dialogue instauré à travers une relation de confiance entre un maître et son élève ne peut produire les mêmes effets que ceux qui seraient éventuellement provoqués par la seule lecture d’un dialogue philosophique (du fait de l’absence d’une présence humaine dans le processus de conversion). En effet, la présence d’autrui – en l’occurrence du maître ou du guide spirituel (que l’on désignait par le terme grec « kathêgemôn ou hêgemôn, autrement dit celui qui guide, qui montre la voie 40») – joue un rôle fondamental dans le processus de conversion et cela pour plusieurs raisons. I. Hadot nous éclaircit sur l’efficacité de la relation maître à élève :

« Conçue comme une direction spirituelle, l’éducation philosophique était nécessairement plus efficace lorsqu’elle se fondait sur une relation personnelle et amicale entre l’élève et le maître. […] Toutes les écoles philosophiques avaient considéré que l’écrit, le livre, n’était qu’un pis-aller pour remplacer temporairement l’enseignement personnel de maître à élève. Pour Platon, la seule forme valable d’enseignement était le dialogue, fait de questions et réponses – la dialectique 41».

Dans la relation de maître à l’élève, notons tout d’abord que l’élève participe activement à la réflexion : « le dialogue dialectique ne peut progresser que si à chaque étape l’interlocuteur accorde une approbation critique 42» afin de parvenir à un accord à chaque étape de l’argumentation. A cela, il est nécessaire de prendre en compte la relation affective et mutuelle établie entre le maître et son élève car elle joue un rôle essentiel dans le succès de l’enseignement. Comme cela est décrit dans Le Banquet de Platon (209b-d), cette association est fondée sur l’amour : l’amour de la vérité ; l’amour du maître pour les âmes qu’il a choisi de cultiver ; l’amour de l’élève envers son maître qui le guide vers une vie vertueuse 43 (la dimension pédérastique de l’Antiquité grecque est également à prendre en considération). De plus, la présence de l’excellence du maître, qui, à l’image de Socrate, vit une vie exemplaire entièrement tournée vers la philosophie à des conséquences directes sur les motivations de l’élève : « l’autorité du guide spirituel doit donc remplir la fonction de preuve par l’exemple de sa propre vie 44». Ainsi, l’exemplarité et l’autorité morale du maître viennent compléter son discours et facilite le processus de transformation de l’élève. Quant à la composante émotionnelle qui émerge de la relation entre le maître et son élève, celle-ci tient également toute son importance dans le processus de conversion. En effet, comme le souligne I. Hadot, l’appropriation des éléments de la connaissance qui s’incarne dans l’esprit de l’élève ne s’atteint que par la pratique de l’habitude : la connaissance intellectuelle n’est pas suffisante. L’élève doit être pleinement convaincu à tel point que son moi intérieur en soit entièrement pénétré. « Pour que s’opère cette transformation, le guide spirituel emploie diverses méthodes pédagogiques qu’il croit susceptibles d’affecter la partie émotionnelle de l’âme 45». C’est le cas notamment de la beauté d’un discours rhétorique qui est un moyen de produire des effets émotionnels très efficaces sur l’élève 46. Ajoutons également le franc-parler de l’élève qui doit exposer ouvertement ses problèmes et celui du maître qui doit prononcer d’éventuelles reproches bienveillantes à son élève 47 : l’expérience peut être émotionnellement bouleversante.

Bref, comme nous l’avons vu précédemment dans l’exemple du Phèdre, Platon attache une plus grande importance à l’enseignement oral qui exige un partenaire qu’à celui transmis par l’écrit. Cela rejoint d’autres courants philosophiques tel que le stoïcisme ou l’épicurisme où l’idée d’une transformation de soi sans l’aide d’un maître qualifié n’est pas envisageable : « dans les deux cas, le rôle du directeur consiste à faire prendre conscience au disciple de la nécessité où il se trouve de changer dans sa manière de vivre. En somme, le directeur aide le disciple à se connaître lui-même 48». Que ce soit lors d’une relation privée entre le maître et son élève ou lors d’une vie communautaire où le maître vit continuellement avec ses élèves (les pythagoriciens ou les épicuriens en sont des exemples), ce mode de vie semble plus profitable à une amélioration de soi. Or, lorsqu’il s’agit de lire un dialogue philosophique, le processus cognitif semble différer du fait que le lecteur doit faire face à l’absence physique du maître. Le dialogue devient un exercice pratique intérieur dans une présence authentique à soi convoquant l’imaginaire alimenté par la compréhension et l’interprétation que le lecteur fait du texte et de la manière dont il résonne avec sa propre expérience de la vie. Même si l’âme s’interroge, se demande et essaie de se donner une réponse à elle-même, l’expérience de la lecture est un autre type d’expérience que celle vécue lors d’une confrontation dialectique soutenue entre le maître et son élève. Engager par le désir d’une connaissance de soi, l’expérience réelle du dialogue semble plus adaptée et plus efficace à la conversion de soi que par l’exercice de la lecture. Quoi qu’il en soit, et comme nous l’avons vu précédemment, le lecteur des dialogues platoniciens est tout de même susceptible d’amorcer une première métamorphose de son esprit. Hadot précise toutefois que les œuvres philosophiques de l’Antiquité, qu’elles soient des dialogues (Platon), des cahiers de cours (Aristote) ou des traités (Plotin), toutes émanent d’une école philosophique « dans laquelle un maître forme des disciples et s’efforce de les mener à la transformation et à la réalisation de soi. L’œuvre écrite reflète donc des préoccupations pédagogiques, psychagogiques, méthodologiques. Au fond, bien que tout écrit soit un monologue, l’œuvre philosophique est toujours implicitement un dialogue ; la dimension de l’interlocuteur y est toujours présente 49». La lecture de ces œuvres philosophiques antiques doit donc être considérée dans une perspective de la pratique des exercices spirituels 50. Toutefois, même si l’exercice spirituel de la lecture d’une œuvre philosophique est « toujours implicitement un dialogue », il doit se distinguer de l’exercice de l’acte de philosopher par le dialogue concret entre deux interlocuteurs (par exemple le maître et son élève).

Nous avons déjà évoqué à plusieurs reprises l’aspect pédagogique et thérapeutique du dialogue philosophique. L’article suivant (Dimension pédagogique et thérapeutique du dialogue philosophique. La philosophie antique : une thérapeutique de l’âme ? (II)) se penche spécifiquement sur l’aspect thérapeutique du dialogue philosophique et sur la philosophie comprise, dans l’Antiquité grecque, comme une thérapie de l’âme. Nous nous intéresserons à l’étymologie du verbe therapeuein, aux pratiques de soin de soi et au précepte delphique « connais-toi toi-même » (gnôthi seauton). Ce sera l’occasion de nous pencher sur les dialogues platoniciens de l’Alcibiade et de l’Apologie de Socrate.


1Triau, Christophe, « DIALOGUE, notion de », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 22 juin 2020. Disponible à l’adresse : http://www.universalis.fr/encyclopedie/dialogue-notion-de/

2Bailly, et al. Dictionnaire Grec-Français. Ed. revue / par L. Séchan et P. Chantraine, 2015.

3Amiot, Chantal, « Apprendre à penser avec Platon », Études, vol. tome 416, no. 2, 2012, p. 200. Je souligne.

4Ibid, p. 203.

5Ibid, pp. 202-203.

6On retrouve également une critique platonicienne des sophistes et de la rhétorique dans les dialogues Gorgias et le Phèdre.

7Ibid, p. 202.

8Ijsseling, Samuel. « Rhétorique Et Philosophie. Platon Et Les Sophistes, Ou La Tradition Métaphysique Et La Tradition Rhétorique. » Revue Philosophique De Louvain, vol. 74, no. 22, 1976, p. 195.

9Ibid, p. 193. La distinction entre philosophie et rhétorique a été instaurée par Platon. A partir de là, la rhétorique sera vue d’un œil méfiant et critique. Toutefois, pour Isocrate, la philosophie est subordonnée à la rhétorique alors que Cicéron tente de réconcilier la philosophie et la rhétorique. Pour approfondir, Ijsseling, Samuel, op. cit., pp. 203-206.

10Ibid, p. 202.

11Dialogue (genre). Wikipédia : l’encyclopédie libre [en ligne]. Dernière modification de la page le 25 juin 2020 à 14:37. [Consulté le 28 juin 2020]. Disponible à l’adresse : https://fr.wikipedia.org/wiki/Dialogue_(genre)

12Diogène, Les Vies Des plus Illustres Philosophes De L’Antiquité. Tome I : Livre III – Platon, Paris, Lefèvre : Charpentier, 1840, III, 48, Je souligne.

13Gill, Christopher, « Le Dialogue Platonicien. » Lire Platon, Presses Universitaires De France, 2014, p. 57.

14Ibid, p. 58. Ici, C. Gill fait référence au Théétète où Socrate décrit sa méthode dialectique comme une « maïeutique » (Théétète, 149-151). Nous y reviendrons (C.f. 3.2).

15Brisson, Luc, « introduction » à sa traduction du Phèdre, p. 58.

16Ibid, pp. 58-59.

17Ibid, pp. 60-61.

18Dorion, Louis-André, « introduction » à sa traduction du Lysis, p. 233, note 450.

19Dorion, Louis-André. « La Figure Paradoxale De Socrate Dans Les Dialogues De Platon. » Lire Platon, Presses Universitaires De France, 2014, p. 36.

20Gill, Christopher, op. cit., p. 59. Ici, C. Gill propose une interprétation des dialogues de Platon par L. Strauss. Il précise également le cas de la conclusion de la République. Se référer au texte pour plus d’informations (pp. 59-60).

21Hadot, Pierre, & Arnold I Davidson. Exercices Spirituels Et Philosophie Antique., op. cit., p. 72.

22« Pour toutes les écoles philosophiques, la principale cause de souffrance, de désordre, d’inconscience, pour l’homme, ce sont les passions : désirs désordonnés, craintes exagérées ». Ibid., p. 23.

23Ibid., pp. 21-22.

24Ibid., pp. 22-23.

25Ibid., p. 23.

26La liste proposée par Philon d’Alexandrie dont s’inspire Hadot est la suivante : la recherche (zetesis), l’examen approfondi (skepsis), la lecture, l’audition (akroasis), l’attention (prosochè), la maîtrise de soi (enkrateia), l’indifférence aux choses indifférentes, les méditations (meletai), les thérapies des passions, les souvenirs de ce qui est bien, l’accomplissement des devoirs. Ibid., pp. 25-26.

27Dans le sens grec du terme, la méditation semble correspondre plus à un exercice de réflexion et donc de rationalité qu’à une pratique de l’attention, de l’observation des sensations et des pensées comme c’est le cas de la méditation bouddhiste (la méditation orientale tente plutôt de s’extraire de la réflexion intellectuelle pour s’abandonner dans la présence de l’être). H. Duméry précise ce point : « c’est cependant par fausse équivalence que les Occidentaux assimilent à la méditation les exercices d’éradication de soi que l’Orient prescrit à l’individualité psychosomatique (dont les limitations sont illusoires, illusionnantes). Bien que le latin meditor (également le grec meletáô) puisse désigner n’importe quel entraînement, n’importe quelle application, l’activité méditante implique dans les traditions d’Occident un élément de rationalité, une mise en forme de la pensée, qui peut être éventuellement une étape vers la contemplation pure (sans repères, ni sensible, ni intellectuel) ou vers l’extase mystique, mais qui ne peut se confondre avec aucun procédé de déliaison, d’indifférenciation, d’effacement des divers registres de l’affectivité et de la réflexion conscientes ». Duméry, Henry, « Méditation », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 11 juillet 2020. URL : http://www.universalis-edu.com/encyclopedie/meditation/

28Hadot, Pierre, & Arnold I Davidson. Exercices Spirituels Et Philosophie Antique Ibid., op. cit., pp. 30-31.

29Ibid., p. 41. Le précepte delphique « Connais-toi toi-même » est interprété par Platon comme une injonction éthique à se maîtriser soi-même, à prendre soin de soi. Pour plus de précision, voir l’introduction de l’Alcibiade par Jean-François Pradeau : Platon, Alcibiade, trad. Pradeau, Jean-François, & Chantal Marboeuf., Paris, GF Flammarion, 2000, pp. 47-53. Nous reviendrons sur ce précepte delphique (C.f. 2.2).

30Ibid., p. 44.

31Ibid., p. 44.

32Ibid., pp. 44-45.

33Ibid., p. 45.

34Ibid., p. 46.

35Ibid., p. 47. Hadot cite R. Schaerer, La question platonicienne, Paris, 1969 (2e éd.), p. 87. Schaerer ajoute que « l’interlocuteur y acquiert plus de pénétration d’esprit (Sophiste, 227a-b), plus de confiance (Théétète, 187b), plus d’habilité en toutes choses (Politique, 285d sq.) ; son âme se purifie en rejetant les opinions qui formaient les voies de l’enseignement (Sophiste, 230b-c) ».

36Hadot nous renseigne sur l’étymologie de conversion : « du latin, conversio signifie « retournement », « changement de direction » ». La conversion philosophique correspond donc à « un changement d’ordre mental, qui pourra aller de la simple modification d’une opinion jusqu’à la transformation totale de la personnalité ». D’autre part, le terme conversio correspond à deux termes grecs : « epostrophè qui signifie « changement d’orientation », et implique l’idée d’un retour (retour à l’origine, retour à soi), d’autre part, metanioa qui signifie « changement de pensée […] et implique l’idée d’une mutation et d’une renaissance ». Ibid., p. 223.

37Ibid., p. 47.

38Nous reviendrons sur ce terme et sur la dimension thérapeutique du dialogue philosophique (C.f. 2.1).

39Ibid., pp. 38-48.

40Hadot, Ilsetraut, « La figure du guide spirituel dans l’Antiquité » in Hadot, Pierre, & Arnold I Davidson. La Philosophie Comme Éducation Des Adultes : Textes, Perspectives, Entretiens. Paris, Vrin, 2019, p. 343.

41Ibid., p. 344.

42Ibid., p. 344.

43Ibid., p. 345.

44Ibid., p. 348.

45Ibid., p. 354 et p. 353 pour ce qui précède.

46Ibid., p. 354

47Hadot, Pierre, & Arnold I Davidson. La Philosophie Comme Éducation Des Adultes : Textes, Perspectives, Entretiens. Paris, Vrin, 2019, p. 294.

48Ibid., p. 295.

49Ibid., p. 66.

50Hadot ajoute que « la philosophie apparaît alors, dans son aspect originel, non plus comme une construction théorique, mais comme une méthode de formation à une nouvelle manière de vivre et de voir le monde, comme un effort de transformation de l’homme ». Ibid., p. 71.

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